
L’hôpital redressé !
Lorsque le directeur général de l’Agence Régionale de Santé estime que la situation financière de l’établissement l’exige, ou lorsqu’il présente une situation de déséquilibre financier, ce qui revient au même, il demande à l’hôpital de présenter un plan de redressement, dans le délai d’un, à trois mois.
Si le directeur ne présente pas de plan de redressement dans le délai requis ou s’il refuse de signer l’avenant au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, ou s’il ne l’exécute pas, ou encore lorsqu’il ne permet pas de rétablir la situation, le directeur général de l’Agence Régionale de Santé place l’hôpital sous administration provisoire. Il confie la gestion, soit à un conseiller général des établissements de santé[1], soit à des inspecteurs du corps de l’inspection générale des affaires sociales ou de l’inspection générale des finances, soit à des personnels de direction, soit à toute autre personnalité qualifiée, désignée par le ministre chargé de la santé.
Pendant cette période, les attributions du conseil de surveillance et du directeur sont assurées par les administrateurs provisoires. Le directeur est mis hors d’état de nuire. Il est alors placé en recherche d’affectation auprès du Centre national de gestion, sans aucune procédure contradictoire. Ce placement en recherche d’affectation peut être étendu à d’autres membres du personnel de direction, des médecins ou à des directeurs des soins.
Selon les explications du Centre National de Gestion, c’est une position d’activité transitoire, de deux années maximums, qui a pour objectif compte tenu des nécessités du service, de permettre aux directeurs leur adaptation ou leur reconversion professionnelle ou de favoriser la réorganisation ou la restructuration des structures hospitalières en bénéficiant d’un accompagnement personnalisé. En quelque sorte, si le directeur veut gérer à nouveau un établissement, il faut qu’il soit reprogrammé pour les restructurations !
En moyenne, plus d’une centaine de professionnels sont régulièrement suivis par le Centre National de Gestion : ils étaient ainsi 132 au 4 mai 2009 (67 directeurs, 65 médecins) dont 42 en recherche d’affectation (21 personnels de direction et 21 médecins).[2]
La violence, la maladie, la souffrance et la mort sont désormais des valeurs commerciales, des nouvelles formes de ressources humaines.
L’hôpital en concurrence
La nouvelle gouvernance de l’hôpital est maintenant similaire à celle d’une entreprise privée. Adéquation, stratégies adaptation, performance, mutualisation, optimisation, efficience, des mots à la mode hospitalière. Ecoute, respect, humanité, douceur, bienveillance, sont archivés.
Les gains de productivité réalisés depuis le grand changement économique des années 70, ne retournent ni à l’emploi, ni au salaire. Ils vont simplement permettre aux hôpitaux Français d’être concurrentiels, c’est-à-dire de pouvoir se placer sur le marché de la santé pour participer à la concurrence libre et non faussée des traités européens et donc, des intérêts des prédateurs. Le statut protecteur de la fonction publique va rapidement devenir caduc et, comme à France Télécom ou La Poste, les salariés auront le choix entre le statut au salaire bloqué et la convention collective mieux payée. A ce jour, ce sont les directeurs d’hôpital qui sont chargés de préparer le terrain.
Les directeurs et les médecins semblent se réveiller. Dans un communiqué du 19 avril 2011 à l’Agence de Presse Médicale, les employeurs des hôpitaux et les Présidents des Commissions médicales (médecins) « expriment à nouveau leurs profondes réserves quant aux choix budgétaires et tarifaires opérés par les pouvoirs publics. La FHF et les Conférences ne peuvent accepter que les efforts ne soient pas équitablement partagés et que les décisions prises par le gouvernement avantagent délibérément le secteur privé (gel de l’enveloppe Mission d’Intérêt Général, baisse de la quasi-totalité des tarifs publics, financement par l’enveloppe secteur public des frais de gardes et astreintes des hôpitaux privés …). »
C’est aussi l’avis de Gérard Vincent le secrétaire général de la Fédération Hospitalière de France (2011) qui croit déceler dans la campagne tarifaire et la poursuite de la convergence une « volonté délibérée de réduire les moyens du service public au profit du secteur commercial ». Il observe que même si la part d’activité du secteur public croît, son chiffre d’affaires progresse moins vite que celui des cliniques malgré une « activité stagnante ».
Sans vouloir parler de « manipulation des tarifs », il a pointé des « tours de passe-passe dans les tarifs » du secteur privé qui permettent aux cliniques d’être mieux rémunérées que le secteur public.
Le délégué général de la FHF a par ailleurs dénoncé des suppressions de postes importantes dans la fonction publique hospitalière (FPH), rappelant des chiffres que la DGOS avait contestés. Alors que l’hôpital ne devait pas être touché par la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, il s’est déclaré convaincu qu’au terme du processus, ce sera la FPH qui aura supprimé le plus d’emplois, proportionnellement à ses effectifs.
[1] Nommés par la Ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, les 28 conseillers généraux des établissements de santé ont pour mission d’accompagner les établissements de santé publics, privés ou participant au service public dans l’actuel processus de modernisation.
[2] Source site « infos-emploipublic. fr »-Hôpitaux- « le Centre national de gestion soutient la mobilité des personnels » Publié le 07/05/2009
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Table des matières interactive
Première partie ; L’hôpital,cette entreprise disloquée !
Chapitre 1 : Un cocktail à la sauce financière.
- 1.1.2- Le financement de l’hôpital (T2A)
- 1.1.3- L’aide à la performance.
- 1.1.4- La contre-indiquée tarification à l’activité(T2A).
- 1.1.5- Un contrat à tous les étages.
- 1.1.6- Un contrat de pôle jusqu’à l’absurde.
- 1.1.7- L’hôpital redressé pour être concurrentiel
Chapitre 2 ; vous avez dit ressources humaines
- 1.2.1- Le management sans ménagement.
- 1.2.2- Le cadre, ce manager hospitalier.
- 1.2.3- Le dialogue social en panne.
Chapitre 3 : le temps de travailler
- 1.3.1- Le temps de travail malmené !
- 1.3.2- On travaille à crédit ou bénévolement
- 1.3.3- Le temps de travail est un enjeu économique.
Deuxième partie..Des témoins, des causes et des espérances.
Chapitre 1: témoignages
- 2.1.1- Le témoignage des hospitaliers.
- Silence hôpital.
- A l’entrée, le concierge : médiateur ou gladiateur ?
- Un petit tour par les urgences rurales.
- A la rencontre d’une équipe débordée.
- La journée de Rosa, infirmière,
- une Infirmière comme les autres.
- visite du « Centre 15 ».
- Radiographie d’une manipulatrice.
- Quand les cadres s’éveillent !
- Richard un directeur gentil
Chapitre 2 ; causes et conséquences
- Et comme si cela ne suffisait pas !
- L’évaluation détournée
- La fin de la notation : une duperie éhontée !
- Vive le contrat d’objectif individualisé !
- Un contrat broyeur d’hommes.
Chapitre 3 ;
- Les « nains jaunes ».
- Une rencontre surprenante.
Chapitre 4 ; Des espérances
- Osons des réponses.
- Engager le débat sur la santé publique.
- Pour la prévention.
- Pour un hôpital rassemble.
- Pour de nouvelles infirmières :
- Pour préserver les personnels.
- Pour un dialogue social apaisé.