
Le travail à crédit.
Selon une autre étude de la DRESS [1], 50 % du personnel infirmier déclare travailler fréquemment au-delà de la « durée habituelle ». En raison de la complexité d’organisation des plannings de jour, de nuit et du week-end, la majorité des salariés déclarent ne pas être libres dans le choix de leurs horaires : ceux-ci sont imposés sans possibilité d’aménagement.
Comme dans les autres secteurs de l’économie, c’est en bas de la hiérarchie, parmi les aides-soignantes, les agents de service et les ouvriers, que les horaires sont le plus fréquemment contraints sans possibilité de modulation (près de 90 % de ces professionnels). Selon cette même étude, il ressort que tous les constats sont aggravés dans le secteur public qui n’a rien anticipé. Il ne suffit pas de parler de la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC) pour qu’elle devienne une réalité.
Les directeurs ont beau remettre en cause tout ce qui peut l’être, le manque de personnels se fait sentir à tous les étages. Les heures supplémentaires et les jours portés sur des comptes épargnes temps s’accumulent dangereusement. La tension monte. Les agents se voient contraints d’effectuer des heures sans savoir si ces dernières seront payées ou récupérées. Un nouvel accord est signé dès le 9 janvier 2003 pour améliorer le précédent et pour permettre aux agents de ne pas perdre les jours de repos, de congés ou de RTT qu’ils n’ont pu prendre. En juillet 2007, le même Dominique Acker, rend un rapport attendu et alarmant qui souligne notamment « qu’au 31 décembre 2005, le total des jours épargnés en CET représentait, toutes catégories confondues, plus de 2,2 millions de journées de travail, soit l’équivalent de 10 665 emplois à temps plein » ! [2]
Le rapporteur souligne que ces résultats sont « vraisemblablement minorés par rapport à la réalité, car il n’est pas certain que tous les établissements aient correctement rempli les questionnaires. »
Une autre enquête de la DHOS [3] informe les fonctionnaires hospitaliers que les 2,2 millions de jours de CET sont passés à 2,6 millions fin 2007 et que 23 millions d’heures supplémentaires sont non récupérées et non payées. Ce nombre d’heures dues augmente régulièrement : 17,5 millions fin 2005, 20,5 millions fin 2006, et 23 millions fin 2007. Sur la pression des organisations syndicales, des négociations sont ouvertes le 8 janvier 2008 pour solder la situation. Un accord sera rapidement trouvé pour financer une grande partie de ce « stock ». Un financement à hauteur de 600 millions d’euros est ajouté au précédent protocole. Les cadres percevront 125 euros par jour, les infirmiers 80 euros et les personnels dit secondaires 65 euros dans la limite de 50 % des jours épargnés par l’agent sur son CET. Tous les agents se voient reconnaître le droit de demander une indemnisation de la totalité de leurs heures supplémentaires stockées restant dues au 31 décembre 2007, sur la base d’un forfait de 13 € brut de l’heure.
Malheureusement la réalité sur le terrain est bien différente. Le retour au bénévolat du vieil hospice guette !
[1] DRESS (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) des ministères, du travail, de la fonction publique, du budget, de la santé : Etudes et résultats n°709 de novembre 2009« L’organisation du travail à l’hôpital : évolutions récentes »
[2] 4 842 postes de médecins et 5 823 postes de personnel hospitalier.
[3] DHOS : Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins. (aujourd’hui DGOS – Direction générale de l’Offre de Soins)
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Table des matières interactive
Première partie ; L’hôpital,cette entreprise disloquée !
Chapitre 1 : Un cocktail à la sauce financière.
- 1.1.2- Le financement de l’hôpital (T2A)
- 1.1.3- L’aide à la performance.
- 1.1.4- La contre-indiquée tarification à l’activité(T2A).
- 1.1.5- Un contrat à tous les étages.
- 1.1.6- Un contrat de pôle jusqu’à l’absurde.
- 1.1.7- L’hôpital redressé pour être concurrentiel
Chapitre 2 ; vous avez dit ressources humaines
- 1.2.1- Le management sans ménagement.
- 1.2.2- Le cadre, ce manager hospitalier.
- 1.2.3- Le dialogue social en panne.
Chapitre 3 : le temps de travailler
- 1.3.1- Le temps de travail malmené !
- 1.3.2- On travaille à crédit ou bénévolement
- 1.3.3- Le temps de travail est un enjeu économique.
Deuxième partie..Des témoins, des causes et des espérances.
Chapitre 1: témoignages
- 2.1.1- Le témoignage des hospitaliers.
- Silence hôpital.
- A l’entrée, le concierge : médiateur ou gladiateur ?
- Un petit tour par les urgences rurales.
- A la rencontre d’une équipe débordée.
- La journée de Rosa, infirmière,
- une Infirmière comme les autres.
- visite du « Centre 15 ».
- Radiographie d’une manipulatrice.
- Quand les cadres s’éveillent !
- Richard un directeur gentil
Chapitre 2 ; causes et conséquences
- Et comme si cela ne suffisait pas !
- L’évaluation détournée
- La fin de la notation : une duperie éhontée !
- Vive le contrat d’objectif individualisé !
- Un contrat broyeur d’hommes.
Chapitre 3 ;
- Les « nains jaunes ».
- Une rencontre surprenante.
Chapitre 4 ; Des espérances
- Osons des réponses.
- Engager le débat sur la santé publique.
- Pour la prévention.
- Pour un hôpital rassemble.
- Pour de nouvelles infirmières :
- Pour préserver les personnels.
- Pour un dialogue social apaisé.